Tu vois, c’était là que je m’installais
La plupart du temps et des soirées
J’regardais les gens vivre leurs vie
Descendre et monter des bus
Attendre leurs correspondances
Leurs yeux traversaient mon teint gris
Ils ne me voyaient plus
A chacun ses souffrances
Tu sais, j’avais un banc tendre et bavard
Ou c’est du moins c’que j’voulais croire
Le banc ne m’a jamais parlé d’sa vie
D’ailleurs même les gorgées d’alcool
N’ont pu changer cette évidence
Pourtant deux yeux verts m’ont souri
On s’échangea quelques paroles
Le temps de la correspondance
Tu sais, c’est devenu une bonne amie,
Ensemble le monde est plus joli
J’étais devenu son p’tit papy
Et c’est ainsi que chaque jour
Je l’attendais avec impatience
Ses yeux rayonnaient sur ma vie
Ils effaçaient de mon parcours
Ma sollitude et mes silences
J’voudrais être plus jeune pardis
Et revenir à l’école ici
Qu’on fasse la route les mains unies
Car si j’étais môme également
J’eus pris l’même bus coïncidence !
Cette place où je traînais ma vieillesse
Où les bus se croisaient sans cesse
Tu vois était là je te le dis
Mais ce n’est plus qu’une zone commerciale
Qui brille pour faire des dépenses
Et quelque chose me frappe ici
Il n’y a plus un banc c’est glacial
Une place vide en circonstance
Tu sais la jeune fille du bus,
Elle vient me voir parfois, pas plus
Au mouroir des vieux réunis
Oui c’est mon rayon de soleil
Mon p’tit bonheur du dimanche
Ses yeux réchauffent mon corps flétris
J’redeviens jeune grâce à ce miel
Et je retrouve mon enfance
Matthieu Marcillaud
Février 2007
A mon bureau,
Angoulême
Texte une nouvelle fois inspiré des travaux de la place du Champ de Mars à Angoulême qui accueillaient un grand échangeur de bus en plein centre ville, place maintenant aux mains d’investisseurs privés, avec un grand parking souterrain, des chics appartements, des grands magasins pour faire bien...
Les bancs, il n’y en a pas encore, mais je ne désespère pas, les travaux ne sont pas finis, croisons les doigts... quand aux bus, ils sont déjà partis ailleurs, aux 3 coins de la ville.